Blessée

Lundi dix heures, Béatrice se réveille.

Normalement à cette heure-là Béatrice aurait dû être à son travail Cela fait vingt-cinq ans qu’elle travaille à la banque LCL et jamais elle n’a pris, avant cette date, un jour de congé.

Béatrice frissonne. Elle frissonne depuis hier. Elle regarde son ordinateur et réalise que c’est par lui qu’elle a vécu ce cauchemar.

Elle fait peine à voir.

Béatrice a quarante-huit ans et elle adore tout ce qui est nouvelle technologie elle a deux ordinateurs, un Ipod, et la Wi fit. Les mots spiwere , formatage et mettre en quarantaine font partie de son vocabulaire.

Elle regarde sa porte et a peur qu’il ne soit derrière. Elle entend ensuite son portable, un sms de sa meilleur amie Carine « Alors raconte moi ton rendez avec cet homme ? »

Carine ne sait pas une chose, c’est que cet homme a vingt ans de moins que Béatrice.

Béatrice lui a toujours caché qu’elle a un faible pour les hommes beaucoup plus jeunes qu’elle. Elle en a honte.

Béatrice ne sourit plus depuis le drame.

Pourtant Béatrice souriait tout le temps, elle avait pour but de rendre heureux le monde qui l’entourait. Elle voyait la vie en rose et ça dans le double sens car son papier peint aussi était rose comme son tapis ou même sa robe de chambre.

Son chien aboie, fallait dire qu’il n’a pas eu le droit à son petit déjeuner ni à son câlin. Béatrice s’en fiche qu’il aboie, elle ne pense qu’à une chose, parviendra-t-elle à tenir le coup après ce choc ?

Pourtant Béatrice a toujours eu un amour fusionnel avec son chien (d’ailleurs habillé en rose) elle passait trois heures par jour à le caresser et à l’entretenir. Elle disait toujours « Mon chien c’est l’homme qui m’a jamais déçu. »

Cet homme, elle l’a rencontré sur un site de rencontre, elle aime cette idée de se sentir désirée par de jeunes garçons sans se déplacer mais la rencontre avec celui là ne se passera pas comme les autres …

Béatrice commence à pleurer et les pleurs se terminent en cris, elle souffre. Elle n’aime plus la vie.

Elle a toujours été une optimiste elle disait « La vie c’est comme une grosse gaufrette. »

Elle était tellement pressée de rencontrer ce fameux jeune homme ; faut dire que la photo sur son profil sur ce site de rencontre donnait envie. C’était un jeune garçon de vingt-cinq ans avec des abdos bien marqués, c’était le rêve pour Béatrice.

Elle était marquée à vie et elle le savait.

Il est arrivé chez elle hier vers dix-neuf heures trente, il avait sûrement bu un verre de trop, ça a commencé par des insultes et ensuite il l'a battue pour ensuite la violenter. Au début cela ne la dérangeait pas, elle était toujours prête pour de nouvelles expériences mais ensuite quand il a commencé à lui tirer les cheveux elle a commençé à se débattre et plus elle se débattait, plus il lui faisait mal. Ensuite il la frappa sur la tête et c’est à ce moment-là qu’elle ne se rappelait plus de rien.

Le lendemain Béatrice s'est rendue compte qu’elle s’était fait battre et violer.

Béatrice ne cessait de se répéter qu’elle n'aimait plus la vie et là elle se rappelle de son fusil qui est au grenier.

Ce fusil elle l’a eu après la seconde guerre mondiale. Elle venait de s’installer en France après avoir vécu toute sa vie en Allemagne et elle avait du mal à faire face à toutes les insultes des français alors l’acquisition d’un fusil lui semblait utile. Elle n’imaginait sûrement pas qu’elle utiliserait un jour son fusil contre elle.

AG
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